Un homme au chapitre de la mort, prénommé Louis, écrit une lettre à sa femme pour y faire son examen de conscience, vider son cœur, lui raconter son orgueil, sa haine, son amertume, ses affections secrètes et finalement, la transformation qu'il a vécue à l’automne de sa vie. Un avare exécré par sa famille et aliéné du monde qui, anxieux et sans ressources dans l’univers opaque qui l’entoure, élevé par une mère recluse, a développé une seule passion, l’argent. L’argent était pour lui son arme secrète, celle qui le vengerait de ses nombreuses frustrations. Le personnage me rappelle largement celui de Séraphin, le célèbre protagoniste d’Un homme et son péché de Claude-Henri Grignon, paru l’année suivante (1933). Un être rongé par des animosités, en guerre contre le monde, mais qui cache au plus profond de lui une âme d’enfant vulnérable, altérée d’absolu. Le texte est empreint du catholicisme de Mauriac en cela qu’il peut être lu comme une longue réflexion sur la foi, la fausse dévotion et l’amour de son prochain. Le changement de perspective de la fin du roman, où, après la mort de Louis, son fils Hubert et sa petite-fille Janine échangent des lettres au sujet du défunt, le premier pour le vouer aux gémonies, la seconde pour le défendre, confère au texte une qualité polyphonique. Les points de vues sont multiples, et toutes les vérités sont relativisées pour montrer qu’en matière d’éthique humaine, les oppositions tranchées sont rarement une approche adéquate. Tout est plus complexe qu’il n’y paraît, et l’amour de Dieu trouve ses propres chemins vers le cœur du sujet.
Juin 2025

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